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Guey & Sabatier, Lasécu - Espace d'art contemporain à Lille
Exposition Terminée

Guey & Sabatier

18 mai > 13 juil 24
Vernissage vendredi 17 mai 2024 à partir de 18h30, repas ''after'' à 20h30 réservation sur place.
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COMMENCEMENT
À Lasécu, il y a ce beau souci de l’art avec ce qui devrait toujours être son corollaire, le souci du commun, de la rencontre, de l’échange et aussi, ce désir de découverte où se mêlent nos interrogations face au sensible des œuvres.
Qu’est-ce qui advient dans l’art ? Qu’est-ce qui y re-vient du monde, de l’homme ? Quelle onde nous porte à toucher, éprouver du regard ce qui se présente dans la singularité de son éclat ?
Peut-être cette quête d’expérience sensible qui déborde l’œuvre et nous déborde dans un même mouvement, une même tension, une même énergie.
Le monde est là. Et le temps est ce qui vient où tout arrive, tout passe.
L’artiste quant à lui nous rend le monde autrement. Il nous donne à voir et à ressentir un autre monde possible que celui déjà là, constitué dans ses formes, temporalités, structures, sociétés, institutions...
Commencement libre, l’art s’institue par lui-même et pour lui-même quelles que soient les formes singulières dans lesquelles il “s’expeause” avec une visée sans fin. L’œuvre s’ouvre depuis elle-même et se creuse en elle-même : l’illimité dans la limite, l’infini dans la finitude ; en somme, un inachevé en dehors de toute valeur d’usage.
A rebours des multiples fonctions de la photographie, Jean-Baptiste Guey recherche une interruption du sens dans l’acte photographique. Un désir de voir qui prend forme dans la suspension produite par la puissance ontologique de la photographie : un écart de la lumière entre le monde et la surface photosensible. Cette possibilité unique, quasi magique de la photographie a de multiples effets et le premier d’entre eux est cette déposition silencieuse du temps à la surface de l’image, une mémoire sans passé qui se réactive continûment...
Les systèmes sculpturaux de Benjamin Sabatier nous rappellent que l’art aussi est une technè. Homo faber, il interroge dans l’acte de création les concepts de processus et de travail qui participent de la transformation du monde. Au coeur de sa démarche, l’oeuvre semble comme taillée en pièces (au sens propre comme figuré), en morceaux savamment assemblés par sa main selon des procédés de fabrication qui se manifestent visiblement... Et l’on se demande souvent comment ça tient ? Mais ça tient. En dehors, en dedans, en deçà.

 
Jean-Baptiste GUEY
''
Toutes mes images sont les traces d’une rencontre. Elles m’ont approché au cours de longues marches répétées dans cette région retirée d’Espagne, l’Extrémadure. Elles viennent à moi (un horizon qui s’ouvre, un chemin qui se perd, un chêne qui ombre, une brume qui s’élève...) autant que je viens à elles avec pour médium, un appareil photo. Elles sont des choses vues au-devant de moi, attrappées, rapportées, assemblées avec la patience et l’obstination du chercheur d’or ou ce brin de folie qui habite le chasseur amateur de papillons. Oui, des rencontres avec le monde sensible, ce monde que nous habitons qui ne se sait ni beau, ni laid, ni droit ni courbé, ni vrai ni faux, ni net ni flou... Le monde est là dans sa mystérieuse présence qui se pousse, s’étend, se plie et se déplie tout en étant ramassé en lui-même. Et plus je m’avance vers lui, plus je ressens cette force; une énergie d’une telle intensité que nous avons beau le transformer et l’exploiter, le monde continuera à pousser sans nous... Alors, ce qui reste de mes traversées et rencontres sensitives, c’est sans doute cette saisie du monde dans l’instant photographique qui vient se déposer librement et croître dans une forme d’évidence depuis la surface des images. Et finalement, peut-être que le seul sens à y chercher est dans l’exercice de nos sens, dans le désir de voir qui est toujours mouvement : rencontrer les images, s’en approcher, s’arrêter, en ressentir les formes, s’en éloigner, éprouvant en nous-même que notre futur est déjà notre passé. Extrémadure, le chant de la terre nous vient, nous touche et nous regarde non pas pour une contemplation, pas même pour une consolation, juste pour “être avec” dans l’écart de la photographie.''


Benjamin SABATIER
Les processus et systèmes sculpturaux mis en place par Benjamin Sabatier témoignent d’une littéralité assumée, ou se dévoile d’emblée, sous couvert d’apparente simplicité, les ressorts formels de l’œuvre. L’angoissante question du "comment ça marche, comment ça tient ?" se résout ici dans une formule tautologique plus ou moins réelle mais toujours crédible laissant les logiques de construction apparaitre en tant que telles, à la fois cause et résultat. Cette extrême lisibilité des procédés de fabrication, ainsi que l’usage récurrent de matériaux bruts et facilement disponibles – brique, étai, pot de peinture, planche de bois, poutre, sac de ciment, carton, scotch, etc. – tendent a se démarquer du geste héroïque du créateur inspire au profit d’une esthétique du chantier qui semble rendre possible et accessible la reproduction des œuvres par tout à chacun. En suggérant de la sorte au spectateur de devenir a son tour producteur, la démarche de Benjamin Sabatier s’envisage à l’aune des théories alternatives et émancipatrices du "do it yourself". Qu’il taille des crayons pendant 35 heures au Palais de Tokyo, crée la structure de production d’œuvres en kit IBK, s’empare de l’histoire industrielle et culturelle de la ville de Besançon, réévalue les utopies de l’architecture modernes ou déploie une œuvre sculpturale marquée par une esthétique du chantier, Benjamin Sabatier interroge de manière récurrente les concepts de processus et de travail, qui fonctionnent comme étalons d'une démarche cherchant avant tout à inscrire la création dans un contexte socio-économique plus large. Cette prégnance de la forme révèle en fin de compte le potentiel démocratique et politique d’un travail polysémique jouant des évidences et des paradoxes, agrégat de références à l’histoire de l’art moderne, aux utopies sociales et aux techniques de merchandising contemporaines.
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