APORIES le titre de l’exposition choisi par Valérie Vaubourg est littéralement une absence de passage, une impasse dans le raisonnement.
L’aporétique est constitutif : l’impossible ne serait plus l’opposé du possible, mais au contraire ce qui ‘‘hante le possible’’ , ce qui ‘‘peut’’ véritablement dans le possible, ce qui l’ouvre ou le possibilise. L’im-possible est possible, non pas au sens où il deviendrait possible, mais dans le sens plus radical où l’impossible est possible.
Les raccommodages [Série 2020] - En période de confinement, la disponibilité des matériaux et l’accès à un atelier se font plus difficiles. L’artiste Valérie Vaubourg s’est ainsi tournée vers ce qu’elle avait sous la main, des verres à vin. Compagnons privilégiés, objets à briser ou matière à penser, les verres à vin et leurs formes variées sont des objets familiers et quotidiens. La fragilité de leur constitution, ou les accès de colère des scènes quotidiennes, en font des objets à la vie souvent courte. Ils sont artificiels, nés de la main de l’homme et distribués en grande quantité, mais ne semblent pas armés face au temps. Ils doivent être « raccommodés ».
Comme dans un cimetière des objets cassés, témoins des épisodes de vie de chacun, les verres à vin de Valérie Vaubourg font l’objet de « raccommodages » qui complètent, remettent en forme mais n’effacent pas la trace de la blessure. Ici les raccommodages semblent être faits avec de la dentelle qui leur donne un aspect encore plus vulnérable.
De façon poétique, les squelettes de feuilles viennent en effet délicatement panser les extrémités tranchantes du verre. L’aspect lourd, blessant et immuable du verre contraste avec la finesse et la légèreté de la feuille, déjà morte et en pleine décomposition. Le squelette de la feuille nous rend visible l’intérieur et la fragilité des tiges qui le supportent. A terme, seul le verre perdurera et sa rencontre avec cet élément naturel ne sera qu’un souvenir. La matière organique tend à réparer, consolider. A la manière de la chrysalide d’un papillon, la matière organique englobe, panse, pour créer la vie et la nouveauté.
Faire de l’art consiste pour moi à objectiver sa propre expérience du monde. L’art crée une sorte de commentaire que le spectateur reçoit en ses propres termes.
Welcome, trou de Mémoire, Mémories sont une sorte de commentaire, révélateur de situations existantes et de représentations courantes. Cela suppose que notre vision de la réalité, notre conception de la normalité, l’acceptation de la violence, sont constamment suscités et influencés par l’image et le langage. Welcome, Trou de Mémoire, Mémories jouent de l’ambivalence des juxtapositions et opérent un glissement sémantique. De l’image au mot, d’une symbolique à l’autre, le matériau et la technique ne sont pas anodins non plus. Fil de fer barbelé, voile de coton, poinçon, broderie...
Le cercle en barbelé de Trou de mémoire livre deux images, courantes, immédiatement identifiables. La couronne d’épine, instrument de la passion et le fil de fer barbelé, littéral, qu’on appelle aussi ''corde du diable'', ''écharde du souvenir'' ou ''frontière brûlante'' : outil agricole ingénieux devenu outil politique, symbole universel de l’oppression. La technique choisie, la broderie est un puissant vecteur de messages socio-politiques. Elle est, ici, le médium du langage. Rappelant au passage le rôle de la broderie dans l’éducation de la jeune fille.
Les horaires et les modalités d’ouvertures au public sont soumises aux contraintes sanitaires, donc susceptibles de changer.